L'église de Saint-Martial
L'église Saint Martial est, à Chalais, l'un des trois éléments architecturaux majeurs qui forment, avec le Château et le cloître, le cœur de la Haute-Ville. Dépendant du diocèse de Saintes, il s'agit d'une église seigneuriale intimement liée à la famille des Talleyrand-Périgord. Ses origines semblent remonter à une fondation due à l'installation d'un prieuré dépendant de l'abbaye Saint-Martial de Limoges. Plus aucune trace ne subsiste de ce premier prieuré mais il semblerait qu'il se situait alors au sud de l'actuelle église, le cimetière occupant quant à lui la zone septentrionale de l'ensemble ecclésiastique.
Une façade caractéristique de l'art Saintongeais
De l'édifice du XIIe siècle il ne reste plus que la façade, classée Monument historique en février 1902. Cette façade constitue encore aujourd'hui le meilleur témoin de ce qu'était alors l'édifice. Elle est constituée d'un portail central et de deux baies aveugles, chacun des éléments est couvert de riches archivoltes, caractéristiques du roman saintongeais. Les voussures sont recouvertes de
décors géométriques, floraux (épis de blé) et de bestiaires réel et mythologique. La voussure qui enrobe le tympan de la porte est formée d'arcs outrepassés de type mauresques. La structure générale de la façade amène à penser que l'église comportait alors une nef centrale entourée de bas-côtés. Le fronton, totalement arasé aujourd'hui était à ses origines décoré de fenêtres aveugles sur deux niveaux. L'église étant orientée, le portail en calcaire, faisant face à l'Ouest, a subi de lourdes dégradations dues à l'érosion et nombre d'éléments sculptés sont aujourd'hui difficilement identifiables. On devinera ainsi aux écoinçons la présence de personnages placés sur des pierres en encorbellement. Par recomposition, on peut clairement identifier des chevaliers debout sur des têtes monstrueuses. Peut-être doit-on lire ici la victoire des vertus sur les vices, thème récurrent dans l'art roman saintongeais…
décors géométriques, floraux (épis de blé) et de bestiaires réel et mythologique. La voussure qui enrobe le tympan de la porte est formée d'arcs outrepassés de type mauresques. La structure générale de la façade amène à penser que l'église comportait alors une nef centrale entourée de bas-côtés. Le fronton, totalement arasé aujourd'hui était à ses origines décoré de fenêtres aveugles sur deux niveaux. L'église étant orientée, le portail en calcaire, faisant face à l'Ouest, a subi de lourdes dégradations dues à l'érosion et nombre d'éléments sculptés sont aujourd'hui difficilement identifiables. On devinera ainsi aux écoinçons la présence de personnages placés sur des pierres en encorbellement. Par recomposition, on peut clairement identifier des chevaliers debout sur des têtes monstrueuses. Peut-être doit-on lire ici la victoire des vertus sur les vices, thème récurrent dans l'art roman saintongeais…
Au titre des personnages sculptés, chacune des deux baies aveugles qui entourent le portail comporte un tympan sculpté en ronde-bosse. La scène de gauche figure trois personnages assis de face. Les têtes et les mains ayant été coupées lors des guerres de religion, l'identification de ces personnages est particulièrement malaisée (Christ au centre, puisque le personnage central trône en majesté et est plus grand que ceux qui l'entourent ; apôtres autour de lui ?). La seconde scène, malgré les mutilations qu'elle eut, elle aussi, à subir est beaucoup plus aisément identifiable. Il s'agit en effet de la représentation des trois myrophores qui arrivent devant le tombeau ouvert du Christ. Cette sculpture est tout à fait exceptionnelle puisqu'il s'agit ici manifestement de la seule représentation lapidaire du Saint-Sépulcre sous cette forme (sarcophage surmonté d'un baldaquin) de tout l'Occident chrétien.
Étrange parallèle à faire avec l'église Saint-Jacques d'Aubeterre, l'édifice chalaisien a lui aussi été pillé, brûlé et démantelé en 1569 suite à une attaque de protestants. Seule la façade a été alors conservée, les figures sculptées ayant été à cette occasion « anonymées » par la section de leurs éléments identificateurs (têtes et mains, qui portaient les attributs).
Un plafond peint exceptionnel
L'intérieur de l'église est le résultat de la reconstruction à la fin du XVIe siècle sous l'égide des princes de Chalais. On notera à cette occasion l'aspect sommaire de la construction : une seule nef comptant sur ses côtés des chapelles aménagées dans les espaces constitués par les piliers qui tiennent la voûte. Certainement dû à une reconstruction rapide et faite avec des moyens limités, on remarquera que l'aspect général de l'intérieur rappelle dans sa sobriété le style roman qui dut être celui de la première église.
Élément particulièrement remarquable, le plafond en bois peint date vraisemblablement du XVIIe siècle. Ouvrage tout à fait unique dans la région, le plafond présente sur la nef centrale 4 médaillons polychromes représentant Saint Pierre, Saint Paul ainsi que deux évangélistes, Saint Marc et Saint Luc. Les médaillons représentant ces personnages sont rehaussés de décorations végétales peintes en trompe-l’œil. Les céréales et la vigne utilisées pour le décor rappellent l'environnement rural de Chalais. Les plafonds peints des « bas-côtés » sont également remarquables. On peut voir au dessus de l'actuelle porte latérale un médaillon au cœur duquel figure une colombe, la chapelle étant à l'origine dédiée au Saint-Esprit. De l'autre côté, c'est un ange qui est représenté au cœur du médaillon : il tient dans ses mains une banderole qui porte les termes « Regina Coelorum » ce qui signifie en latin « Reine des Cieux », rappelant ainsi la dédicace de cette chapelle à la Vierge Marie.
La chapelle située dans l'angle sud-est, aujourd'hui occupée par l'orgue, était à l'origine la chapelle des Talleyrand-Périgord, princes de Chalais, comme le rappelle leur blason peint sur la voûte. La découverte fortuite d'une crypte sous cette chapelle nous amène à penser que certains seigneurs de Chalais furent inhumés dans l'église seigneuriale qui revêtait, il y a quelques décennies encore une litre funèbre à leurs armes…
La « chapelle » située en face de cette dernière est, elle, surmonté des armes du Vatican. Or, suite à une découverte fortuite il y a quelques années, une crypte à été ouverte sous cette chapelle. Treize individus ont pu y être recensés. Seulement quelques-uns d'entre eux se trouvaient encore dans leur position originelle, les pieds à l'est et la tête à l'ouest. Or il s'agit ici d'une disposition contraire à l'habitude lors d'une inhumation en terre sacralisée. On peut y lire ici en fait une habitude parfois prise à l'époque moderne pour enterrer les ecclésiastiques et les distinguer ainsi des simples croyants. Il semblerait donc qu'il s'agisse ici des moines qui fréquentaient alors le prieuré construit à l'est de l'église entre 1629 et 1631.
L'église, dans sa version de la fin du XVIe siècle se terminait à fond plat, comme l'atteste l'accolement du cloître juste derrière l'ancien chevet. Voulant améliorer leur lieu de culte, les paroissiens du XIXe siècle ont requis auprès du Duc de Périgord l'autorisation d'amputer quelque peu le cloître alors inutilisé afin de créer une abside imposante pour y accueillir le chœur. La mise en place de cette abside a requis une surélévation de la voûte en cul-de-four au-dessus du chœur et impliqué à la fois une surélévation du clocher et la destruction partielle du plafond peint sur un tiers de la nef, faisant disparaître très vraisemblablement deux médaillons peints – peut-être ceux des deux autres évangélistes – qui doivent encore aujourd'hui se trouver en partie sous une fine couche de chaux les couvrant…
Grégory Bonnin
Président de l'Association pour la Sauvegarde
du Patrimoine du Pays de Chalais